Il y a quelques années, la Tunisie suscitait l’admiration du monde en faisant une révolution qui devait instaurer la démocratie. La liberté d’expression en fut l’un des acquis les plus importants. Force est de constater que cette époque a été de courte durée. Le gouvernement du président en place ne tolère pas la critique et s’attaque à celles et ceux qui s’opposent à lui.
Les arrestations récentes de journalistes, d’avocats, de personnes appartenant à des ONG, (Tunisian Refugee Council, Terre d’Asile Tunisie) sont très préoccupantes. Tout indique un retour aux heures sombres d’une Tunisie autoritaire et hostile aux défenseurs des droits humains. Ainsi l’avocate Saadia Mosbah actuellement détenue est l’une des icônes de la lutte contre le racisme. Quant à Mehdi Zagrouba, l’un des avocats arrêtés, il a dû être hospitalisé, à la suite d’un malaise occasionné par les tortures qu’il aurait subies pendant sa détention.
D’autre part l’intolérance gagne du terrain et aboutit à limiter la liberté de penser des intellectuels et des chercheurs, créant un contexte qui a mené récemment à l’annulation de l’intervention de l’historienne Sophie Bessis lors d’un forum international consacré à la Palestine organisé par le FTDES (Forum tunisien pour les droits économiques et sociaux) auquel elle était officiellement invitée. Un groupe de pression lui reprochait d’avoir signé en janvier 2024 une tribune collective d’intellectuels juifs, publiée dans Le Monde pour condamner la guerre menée par Israël à Gaza ainsi que les massacres du 7 octobre. Après lui avoir dans un premier temps demandé de répondre à ceux qui voulaient l’empêcher de s’exprimer, les organisateurs ont préféré déprogrammer la venue de Sophie Bessis sans en donner publiquement les raisons, la réduisant ainsi au silence et à l’invisibilité.
Le PEN Club français exprime sa très grande inquiétude face à une telle situation. Il appelle à la libération des personnes arrêtées. Il appelle au respect des principes de liberté et de démocratie pour lesquels le peuple tunisien s’est battu lors de sa révolution. Ils sont indispensables à la possibilité du débat nécessaire à toute réflexion er toute pensée.