LIBERTÉ POUR AHOU DARYAEI !

L’image d’une jeune femme en sous-vêtements à la sortie de l’université Azad de Téhéran est devenue un symbole éclatant de la liberté dans le monde entier. Elle s’appelle Ahou Daryaei, est mère de deux enfants et étudiante à l’Université, où elle prépare un Doctorat en littérature française. 

     Alors qu’elle voulait rentrer dans son Université, elle a été prise à partie le 2 novembre 2024 par l’un des sbires du régime des mollahs, qui lui reprochait de ne pas porter correctement le voile et qui lui a déchiré ses vêtements. Elle a alors préféré, dans un geste de défi, se déshabiller plutôt que de se soumettre. Elle s’est promenée fièrement devant des étudiantes voilées et des étudiants, qui ont préféré regarder ailleurs, par peur sans doute de la « police des mœurs », celle-là même qui a assassiné la jeune Kurde Mahsa (Jina) Amini en septembre 2022 parce qu’elle ne portait pas comme il fallait, elle non plus, le voile islamique. Elle a été ensuite violemment embarquée par la police et emmenée dans un asile psychiatrique. 

     Les membres du PEN Club français – Cercle littéraire international entendent rendre hommage au courage de cette femme admirable. Nous voulons rappeler que les dissidents soviétiques étaient autrefois traités de « fous » et enfermés dans des asiles car ils osaient critiquer le « paradis » communiste et que, en Argentine, les « Mères de la Place de Mai » avaient droit au même qualificatif, celui de « folles », de la part de la dictature militaire lorsqu’elles réclamaient la vérité sur leurs enfants disparus. 

     Ahou Daryaei a trouvé les forces, dans l’étude de la littérature française, pour s’opposer aux systèmes d’oppression théocratique qui font des femmes, en Iran ou en Afghanistan, des non-personnes. Nous, écrivains, savons que les lettres de notre pays, de tous temps, depuis Les liaisons dangereuses de Choderlos de Laclos et La religieuse de Denis Diderot à Madame Bovary de Gustave Flaubert ou La mare au diable de George Sand, et aussi Le diable au corps de Raymond Radiguet,  A la recherche du temps perdu de Marcel Proust ou Le blé en herbe de Colette, sans oublier Persepolis de Marjane Satrapi, sont des célébrations des corps et des sens, des femmes et des hommes, exaltant l’amour, pas sa négation insupportable. Bien sûr, les ayatollahs n’aiment pas la littérature, comme le prouve la fatwa lancée depuis 1989 contre Salman Rushdie, suivie d’une dramatique tentative d’assassinat contre lui en août 2022. 

     Les auteurs du monde entier ne peuvent qu’être fiers du geste particulièrement symbolique de Ahou Daryaei, studieuse des lettres libres françaises. Elle ne peut rester entre les mains de ses bourreaux, psychiatres, policiers ou les deux. Une mobilisation massive des femmes et des hommes de lettres est indispensable pour obtenir sa libération.

                                           Paris, novembre 2024         

Jacobo Machover    

                            PEN Club français – Cercle littéraire international