Pendant que les informations mondiales sont sollicitées par d’autres périls, la Biélorussie n’est plus à l’avant-plan mais demeure une préoccupation essentielle pour le droit à la souveraineté démocratique et nous concerne tous, notamment en Europe, au même titre que la lutte des femmes en Pologne contre la nouvelle loi sur l’avortement, associée à la lutte contre les remises en causes de l’Etat de Droit dans ce pays et en Hongrie. La capacité d’innovation dans la résistance à l’oppression dont a fait preuve la population biélorusse donne l’exemple de nouvelles formes de lutte civile pacifique. De cette inventivité dans la résistance font particulièrement preuve les créateurs, artistes, auteurs, mais aussi et partout les différents acteurs de la société civile biélorusse. C’est pourquoi ils sont particulièrement visés par la répression du régime, qui se fait à bas bruit mais quotidiennement. Une énumération résumée parlera ici d’elle-même :
En janvier, Dzianis Ivanoù, musicien de l’Orchestre philharmonique d’Etat, a été arrêté durant une manifestation ; il avait déjà été soumis à une arrestation administrative de 15 jours en novembre 2020. Même sanction pour Marharyta Novikava, photographe, pour sanctionner son action « Nourriture et non bombes » en janvier. Pour une série d’actions aussi, Viktar Carykievic subit une année de régime pénitentiaire. S’ajoute une longue liste de commerces et de sites d’informations emprisonnés ou empêchés de travailler pour détention ou ventes de symboles non autorisés, notamment les trois couleurs du drapeau ou des références à la nation biélorusse : Alena and Valer Jesipionak pour le magasin Moj Rodny Kut ; le 29 janvier la police fouille le magasin Admjetnasc où l’on peut acheter des produits marqués de symboles nationaux, le propriétaire et activiste Siarhiej Vieramiejenka subit une procédure administrative ; à Minsk, la police financière a saisi équipement et produits de vente du magasin Symbal.by et les employés sont accusés d’hooliganisme ; à Minsk aussi, le poète Julij Iljuscanka a été arrêté et condamné à 25 jours de prison le 1er février ; le 29 janvier, dans l’espace Kryly Halopa, l’exposition « J’entends presque les oiseaux chanter », du photographe Maksim Sarycau, n’a pas pu ouvrir plus d’une heure, suite à la visite du Ministre des Urgences. Il suffit de porter des vêtements de couleurs du drapeau blanc-rouge-blanc au balcon ou de lancer des ballons de ces trois couleurs, ou de porter des chrysanthèmes (blancs et rouges) pour être arrêtés. Une pétition en faveur du drapeau a d’ailleurs recueilli 50 000 signatures en une journée.
Mais la résistance culturelle continue activement dans le pays : par vidéos, par exemple celle intitulée « Les mots sont plus puissants », de la poétesse et traductrice Hanna Komar lisant Francisak Alachnovic ; et d’autres artistes s’inspirent directement de l’actualité : Lilya Kvatsabaya, Nika Emerald, Artsyom Bobovnikov.
La solidarité internationale aussi se développe : en Allemagne, notamment sur la plateforme IndieRepublik ; en Autriche, où la communauté littéraire prend la défense du traducteur Volha Kalackaja ; Paviel Sieviaryniec, en prison depuis le 7 juillet 2020, s’y est vu décerner le prix littéraire Zhyznevsky « Guerrier de lumière ».
C’est dire si la répression continue mais aussi la résistance, à laquelle le PEN Club français s’associe pleinement, dans l’optique d’une pression accrue de la France et du Conseil de l’Europe sur les autorités de l’État biélorusse.
Publié par ActuaLitté en février 2021