Le livre pour diffuser la liberté d’expression et la justice
Médiathèque Olympe de Gouges, 3 rue Kuhn, 67000 Strasbourg.
Animatrice : Carole Mesrobian, présidente du PEN Club français
Auteures invitées : Somaia Ramish, Asal Abasian, Pinar Selek
La littérature a joué un rôle central dans la promotion des principes humanistes et de l’égalité à travers les siècles. Elle a servi de plateforme pour remettre en question les inégalités, dénoncer les injustices et diffuser des idées progressistes, contribuant ainsi à l’édification de sociétés plus égalitaires et justes où chacun peut s’exprimer librement. Qu’en est-il aujourd’hui ? Le paysage littéraire contemporain est soumis à des modalités éditoriales inédites, qui ajoutent aux méthodes traditionnelles une diffusion permise par les nouvelles technologies et les médias sociaux, permettant ainsi aux écrivains et aux œuvres produites de toucher un public mondial de différentes manières. Ces données ont-elles une incidence sur son pouvoir émancipateur, et sur la manière dont elle fait sens, et permet-elle l’élaboration d’une communauté planétaire érigée autour des principes humanistes dont elle serait le lieu d’édification ?
Trois femmes, écrivaines et journalistes, évoquerons ces questions, elles qui ont écrit pour résister, contraintes à l’exil pour avoir voulu défendre l’idée de sociétés plus justes, égalitaires, et tolérantes.
Biographie des invitées
Somaia Ramish est poète, écrivain, journaliste et militante des droits de la femme, originaire d’Afghanistan, et vivant aux Pays-Bas. Née en 1986 à Herat, en Afghanistan où sa famille s’est réfugiée à Téhéran, en Iran, pendant la première République islamique d’Afghanistan. Après la première chute des Talibans, elle est retournée en Afghanistan. Au cours des 20 années qui ont suivi, elle a travaillé pour contribuer à la construction d’une société démocratique et égalitaire.
Mais elle a dû demander l’asile en tant que réfugiée après la prise de pouvoir des talibans en Afghanistan en août 2021. Ses mots, sa poésie, sa voix restent ses armes.
Elle plaide en faveur d’une vie meilleure, en particulier pour le peuple afghan. Les femmes, les jeunes filles, les artistes, les poètes et tous ceux qui souffrent en silence à cause de la récente tragédie.
Sa dernière initiative mondiale est création de la la Maison de la poésie en exil Baamdaad (Aube), qui appelle les poètes, les écrivains et les associations littéraires et culturelles du monde entier à soutenir la liberté d’expression à travers l’art et la poésie en Afghanistan.
En décembre 2022, les talibans ont officiellement interdit l’écriture, la publication et la lecture de poèmes dans la vie publique. Après cela, elle a décidé que les poètes du monde entier devaient se donner pour mission d’écrire des poèmes pour soutenir le peuple et les poètes d’Afghanistan. Cette initiative a également reçu le soutien du festival Poetry International 2023, basé à Rotterdam.
Asal Abasian est lauréate 2023 de l’Initiative Marianne. C’est une journaliste iranienne et une féministe queer qui milite depuis huit ans pour l’égalité de genre et les droits LGBTQIA+. Asal a commencé à travailler en tant que journaliste en 2007 et a collaboré pour certains des médias iraniens les plus célèbres comme Shargh, Chelcheragh et Andishe-pouya.
Après avoir été la cible de menaces, Asal a fui l’Iran pour la Turquie en 2021.
Pinar Selek est une sociologue, militante antimilitariste féministe et écrivaine turque.
Fille d’un avocat qui a passé quatre ans et demi en prison après le coup d’État de septembre 1980, et d’une pharmacienne, elle est par ailleurs la petite-fille de Haki Selek, un des fondateurs du Parti des travailleurs de Turquie.
Connue pour ses écrits sur les groupes opprimés en Turquie, elle plaide pour une approche sociologique qui ne situe pas en surplomb des personnes enquêtées mais repose sur une immersion de longue durée.
Ainsi, son mémoire de DEA soutenu en 1997 portait sur la rue Ulkër à Istanbul. Ayant partagé la vie des enfants de la rue pour mieux les connaître, parfois enfants de prostituées, jeunes homosexuels, elle mena sa recherche sur les personnes trans qui furent exclus de cette rue.
Après ce travail, elle commence une enquête d’histoire orale sur la diaspora politique kurde au Kurdistan, en Allemagne et en France. La police turque l’arrête le 11 juillet 1998 et lui demande de livrer les noms de ses enquêtés. Elle refuse de les donner malgré les actes de torture qu’elle subit. Commence alors une des affaires judiciaires les plus emblématiques de la répression que subissent intellectuels, universitaires, étudiants, artistes et journalistes en Turquie.
Persécutée par le pouvoir judiciaire, elle a dû quitter son pays, vivant depuis 2011 en exil en France, où elle a obtenu la nationalité française en 2017.
Docteure en sciences politiques de l’université de Strasbourg, elle a soutenu sa thèse en 2014 sur les « possibilités et les effets de convergences des mouvements contestataires, sous la répression ».
Elle est maitresse de conférence associée au Département de Sociologie à l’Université Nice,3
Pınar Selek est également écrivaine et a publié plusieurs essais et romans, ainsi qu’un conte pour enfants.
Et avec la participation de Salomé Helbourg, traductrice
Lien vers article publié dans Dernières Nouvelles d’Alsace :